Je désire attirer votre attention sur
le treizième chapitre de la première Epitre de saint Paul aux Corinthiens, en
remplaçant le mot de charité par celui d'amour :
"Quand même je parlerais toutes les langues des hommes, et
même des anges, si je n'ai point l'amour, je ne suis que comme l'airain qui
résonne, ou comme une cymbale qui retentit. Et quand même j'aurais le don de
prophétie et que je connaîtrais tous les mystères de la science de toutes
choses; et quand même j'aurais toute la foi, jusqu'à transporter les montagnes,
si je n'ai point l'amour; je ne suis rien. Et quand même je distribuerais tout
mon bien pour la nourriture des pauvres et que même je livrerais mon corps pour
être brûlé, si je n'ai point l'amour, cela ne me sert de rien."
C’est une grande chose que d’être un
prophète comme Daniel, ou Esaïe ou Elie, ou Elisée mais Saint Paul nous apprend
ici que l’esprit d’amour est une chose plus grande encore que l’esprit de
prophétie. Marie de Béthanie, qui savait si bien aimer était supérieure à ces
grands prophètes. Moody D.L.
« L'amour est
patient, il est plein de bonté; l'amour n'est point envieux; l'amour n'est
point insolent; il ne s'enfle point d'orgueil ; il n'est point malhonnête; il
ne cherche point son intérêt ; il ne s'aigrit point ; il ne soupçonne point le
mal ; il ne se réjouit point de l'injustice, mais il se réjouit de la vérité ;
il excuse tout, il croit tout, il espère tout, il supporte tout. L'amour ne
périt jamais. Pour ce qui est des prophéties, elles seront abolies, et le don
des langues cessera, et la connaissance sera anéantie. Maintenant donc, ces
trois choses demeurent : la foi, l'espérance et l'amour ; mais la plus grande,
c'est l'amour. »
L'ennemi
s'était introduit dans la petite Eglise fondée à Corinthe par l'apôtre Paul, et
il y avait des divisions parmi les disciples. L'un disait: « Pour moi, je suis
d'Apollos ; » - un autre disait: « Pour moi, je suis de Céphas ; » et un
troisième : « Pour moi, je suis de Paul. » - Paul vit tout de suite que ces
divisions, que ce manque d'amour des enfants de Dieu les uns pour les autres
auraient des conséquences désastreuses pour l'Église, et alors il écrivit cette
lettre. Je suis convaincu que si tous les vrais croyants pouvaient se pénétrer
de l'esprit de ce chapitre et le mettre en pratique pendant un an, l'Église de
Dieu verrait se doubler le nombre de ses enfants. L'un des plus grands
obstacles au développement de l'oeuvre de Dieu aujourd'hui est bien
certainement ce manque d'amour parmi les disciples de Jésus-Christ.
Quand nous
aimons quelqu'un, nous ne cherchons pas sans cesse à attirer l'attention sur
ses défauts. On a dit avec raison : Il ne manque pas de traités sur l'éloquence
; mais, chose curieuse, il n'en est pas un seul qui indique le véritable secret
de toute vraie éloquence; ce secret, c'est l'amour. Pour atteindre les hommes,
il faut les aimer beaucoup. Quel que soit leur degré de culpabilité, ou
d'indifférence, ou d'ingratitude; quelque bas qu'ils soient tombés, il faut
surtout et avant tout les aimer. L'amour, c'est la sève de l'Évangile, c'est le
secret de toute prédication forte et vivante, c'est l'inspiration la plus
puissante de l'éloquence. Le but de toute prédication est de ramener à Dieu les
coeurs des hommes, et l'amour seul sait découvrir les sentiers mystérieux qui
conduisent au coeur. Si, donc, vous ne possédez pas un fervent amour et une
profonde compassion pour l'humanité, soyez sûr que nous n'avez pas reçu le don
de l'éloquence chrétienne. Vous ne réussirez pas à gagner des âmes, vous
n'acquerrez jamais cette domination, excellente entre toutes, la domination
qu'on exerce sur le coeur de l'homme. Un proverbe arabe dit: « L'épée fait
courber le cou; mais le coeur seul fait courber le coeur. » On ne résiste pas Ã
l'amour.
Ecoutez ces
paroles: « L'amour est patient ; il est plein de bonté ; l'amour n'est point
envieux. » Que de fois n'arrive-t-il pas que si
l'un de nos frères nous éclipse, nous éprouvons de l'envie au fond de notre
coeur. Il faut beaucoup de grâce divine pour détruire ce sentiment-là . «
L'amour n'est point insolent; il ne s'enfle point d'orgueil. » Les chrétiens
ont peu d'ennemis plus redoutables que cet esprit de rivalité gui demande sans
cesse : « Lequel sera le plus grand? »
Il y a quelques
années, j'ai lu un livre qui m'a fait beaucoup de bien. Il était intitulé «
L'éducation des Douze. » L'auteur disait que Jésus avait passé la plus grande
partie de son temps, pendant les trois ans et demi de son ministère, à former
douze hommes. L'éducation qu'il leur donna était bien différente de celle qu'on
donne aujourd'hui dans nos collèges et dans nos écoles. Tandis que le monde
encourage l'ambition, Jésus enseigne à ses disciples l'humilité. Il les exhorte
à se prévenir les uns les autres par honneur; à n'être point enflés d'orgueil,
à n'être point envieux, mais plutôt, à être doux et humbles de coeur.
Un peintre de
l'antiquité, ayant été chargé de faire un portrait très ressemblant d'Alexandre
le Grand, se trouva dans un grave embarras. Pendant une de ses guerres,
Alexandre avait reçu au front un coup d'épée, et en avait conservé une longue
cicatrice. L'artiste se dit: Si je représente la cicatrice, j'offenserai les
admirateurs du monarque ; et si je l'omets, la ressemblance ne sera pas exacte.
Que faut-il faire? Il imagina un heureux expédient , et représenta le grand
roi, le front appuyé dans sa main, cachant ainsi la cicatrice.
Ne
pourrions-nous pas nous représenter de même les uns les autres, en posant la
main de la charité sur la cicatrice, au lieu d'en faire ressortir toute la
profondeur ? Les païens mêmes peuvent donner aux chrétiens une leçon de
charité, de bonté et d'amour.
Ce désir
d'occuper le premier rang a failli perdre l'Eglise plus d'une fois pendant le
cours de son histoire. Si l'Eglise n'avait pas été d'origine divine, elle
serait tombée en ruines depuis longtemps. De nos jours encore, on pourrait
citer à peine un seul mouvement de réforme qui n'ait couru le danger d'être
entravé ou anéanti par ce misérable esprit d'ambition et de personnalité. Que
Dieu nous aide à détruire cet esprit, à jeter loin de nous notre vanité et
notre orgueil, et à accepter Christ pour notre Maître, afin qu'il nous montre
dans quel esprit il faut travailler pour lui.
Une des choses
qui durent le plus attrister la vie de Jésus, ce fut la manifestation de cet
esprit parmi ses disciples, même pendant les dernières heures de son séjour au
milieu d'eux, et jusqu'au moment où il fut emmené pour être crucifié. Nous lisons
dans l'Évangile de saint Luc : « Jésus dit à ses apôtres: Voici la
main de celui qui me trahit est à table avec moi. Pour ce qui est du Fils de
l'homme, il s'en va, selon qu'il a été déterminé; mais malheur à cet l'homme
par qui il est trahi! Alors ils commencèrent à se demander les uns aux autres
qui était celui d'entre eux qui ferait cela. Il arriva aussi une contestation
entre eux, pour savoir lequel d'entre eux devait être regardé comme le plus
grand.
« Mais il leur
dit: Les rois des nations les maîtrisent, et ceux qui usent d'autorité sur
elles sont nommés bienfaiteurs. Il n'en doit pas être de même entre vous; mais
que celui qui est le plus grand parmi vous soit comme le moindre, et celui qui
gouverne comme celui qui sert ; car qui est le plus grand, celui qui est Ã
table, ou celui qui sert? N'est-ce pas celui qui est à table? Et cependant je
suis au milieu de vous comme celui qui sert. »
Même en un
moment aussi solennel, pendant cette nuit mémorable où le Seigneur venait
d'instituer la Sainte-Cène avec ses disciples, après avoir mangé la pâque avec
eux, et où il s'avançait vers la croix, - même alors, cette pensée remplit
leurs coeurs : Lequel sera le plus grand?
Il existe une
charmante tradition sur la fondation du temple de Salomon. Le terrain sur
lequel il fut construit appartenait en commun à deux frères, dont l'un avait
des enfants, et l'autre n'en avait pas. Ils y avaient semé du blé. Le lendemain
de la moisson, deux meules ayant été élevées, l'aîné des deux frères dit à sa
femme : « Mon jeune frère n'a pas la force de supporter la fatigue et la
chaleur du jour, je vais prendre une partie de mes gerbes et les ajouter à sa
meule sans qu'il le sache. » Le frère cadet, animé de sentiments semblables, se
dit en lui-même : « Mon frère a des enfants, et moi je n'en ai pas. Je vais
prendre une partie de mes gerbes et les ajouter à sa meule.
Quel ne fut pas
leur étonnement le lendemain, en trouvant leurs meules respectives aussi
grandes que la veille. La même aventure se renouvela plusieurs nuits de suite.
Chacun d'eux résolut enfin de veiller toute la nuit afin d'éclaircir le
mystère. C'est ce qu'ils firent, et la nuit suivante, ils se rencontrèrent Ã
mi-chemin entre leurs deux meules, les bras chargés de gerbes. Ce fut sur un
terrain sanctifié par un tel souvenir que s'éleva le magnifique temple de
Salomon, la merveille et l'admiration du monde. Hélas ! de nos jours, combien
de frères seraient disposés à dérober toute la meule de leur frère plutôt qu'Ã
y ajouter une seule gerbe !
Si nous voulons apprendre à gagner les
âmes, si nous voulons être utiles au service de notre Maître, il faut nous
débarrasser de ce maudit esprit de rivalité et d'amour-propre. C'est là le fond
de la pensée de saint Paul dans ce passage de son épître aux Corinthiens. Il
leur dit qu'on a beau avoir beaucoup de foi et de zèle, et distribuer beaucoup
d'aumônes, si l'on n'a pas d'amour, on est comme l'airain qui résonne ou une
cymbale qui retentit. Si ce n'est pas l'amour qui inspire et remplit tous nos
discours, nous ferions tout autant de bien aux âmes en sonnant de la trompette
du haut de la chaire qu'en prêchant des sermons. On peut annoncer la vérité ;
on peut enseigner la doctrine évangélique dans toute sa pureté ; si le coeur
n'est pas rempli d'amour pour ceux auxquels on s'adresse, si on prêche par
métier, l'apôtre le déclare, on n'est qu'une cymbale retentissante.
Ce qu'il nous
faut, ce n'est pas tant de travailler davantage que de travailler pour un
meilleur motif. Dieu tient compte du mobile qui nous fait agir, bien plus que
de notre activité extérieure. Le seul arbre sur la terre qui puisse produire
des fruits agréables à Dieu c'est l'arbre de l'amour.
En écrivant Ã
son disciple Tite, saint Paul dit : «Enseigne les choses qui conviennent Ã
la saine doctrine : que les vieillards soient sobres, graves, prudents, purs
dans la foi, dans la charité (ou dans l'amour), dans la patience.» A quoi servirait-il d'enseigner une
saine doctrine, si l'on négligeait l'amour et la patience ? De quelle valeur
nos prières peuvent-elles être si elles ne sont pas inspirées par l'amour ? On
s'étonne parfois de voir tant de prédications irréprochables rester sans
résultats. Ne croyez-vous pas que cela tienne à ce qu'on prêche si souvent par
métier? Les paroles brillent comme le givre au soleil, mais ne réchauffent pas
davantage. Elles n'ont pas une seule étincelle d'amour. - S'il en est ainsi,
vous n'aurez que très peu de force. Quand même vous multiplieriez vos réunions
d'appel, vos réunions de prières, vos réunions d'actions de grâces, si l'amour
ne les inspire pas, vous parlerez en vain. Dieu lui-même vous dit que vous êtes
semblables à l'airain qui résonne et aux cymbales qui retentissent.
On peut être
très bon médecin sans aimer ses malades. On peut être très bon avocat sans
aimer ses clients. Un négociant peut faire d'excellentes affaires sans se
soucier le moins du monde de ses pratiques. Un savant peut nous expliquer les
merveilles de la science ou de la théologie sans éprouver le moindre amour pour
nous; mais sans amour, il est impossible de travailler sérieusement pour Dieu
et de gagner les âmes. On peut passer aux yeux du monde pour être un grand
prédicateur, on peut attirer la foule par de brillants discours ; si un sincère
amour pour Dieu et pour les âmes n'est pas la force motrice de toute cette
éloquence, elle s'évanouira comme une vapeur et comme la rosée du matin.
On raconte que
toutes les fois que les Athéniens entendaient Démosthènes, ils étaient émus au
point de se sentir prêts à partir pour combattre Philippe de Macédoine. Ils
entendaient aussi avec plaisir un autre orateur qui les charmait par son
éloquence ; mais à peine le discours était-il fini, que le charme se rompait,
les belles paroles avaient été creuses. Il ne suffit donc pas de prononcer de
brillants discours qui peuvent entraîner la multitude au moment même; s'ils ne
reposent pas sur un sentiment profond, leur influence ne sera pas durable. Ce
qui faisait la force de Démosthènes, c'était son amour pour sa patrie, et cet
amour, il le communiquait à tout le peuple.
Lorsque nous
aimerons davantage, il nous sera facile de travailler pour le Seigneur. Rien ne
nous paraîtra trop insignifiant. Dieu ne bénit point les travaux les plus
importants si l'amour est étranger ; mais il prend plaisir aux petites choses
faites par amour. Un verre d'eau froide donné à l'un de ses enfants par amour
pour lui, a plus de valeur à ses yeux que la conquête d'un royaume, inspirée
par l'ambition et la vaine gloire.
Je suis fatigué
d'entendre toujours répéter le mot de devoir comme si c'était l'unique mobile
du chrétien. De tous côtés, j'entends dire: Je fais ceci, ou cela, parce que
c'est mon devoir. L'expérience m'a prouvé que les chrétiens qui parlent ainsi
sont ceux qui réussissent le moins bien dans leur travail. N'avons-nous pas un
mobile plus puissant que le simple devoir? Ne pouvons-nous pas nous mettre au
service de Christ parce que nous l'aimons ? Quand c'est l'amour qui nous
pousse, le travail nous paraît toujours facile. Une mère n'a pas de peine Ã
soigner son enfant malade. Elle ne regarde pas cela comme une corvée. Saint
Paul ne nous parle jamais de la peine que le service de son maître lui a
coûtée. Il était pressé de travailler parce qu'il aimait son Sauveur et qu'il
se sentait aimé par lui. Lutter, souffrir même pour son Maître bien-aimé,
c'était une joie pour lui.
Vous me
répondez peut-être que j'ai tort de parler contre le devoir; beaucoup de choses
ne se feraient jamais sans le sentiment du devoir. C'est vrai, mais je voudrais
vous faire sentir que ce n'est pas un mobile suffisant, et que vous pouvez en
avoir un autre bien plus puissant.
Je vais bientôt
retourner dans ma patrie, de l'autre côté de l'Atlantique. Je pense en ce
moment à une mère aux cheveux blancs qui habite, sur les bords du Connecticut,
la même petite ville depuis quatre-vingts ans. Supposons que je lui apporte un
présent à mon retour, et qu'en le lui donnant, je dise : « Vous avez été si
bonne pour moi autrefois que j'ai cru de mon devoir de vous apporter un cadeau.
» Que penserait-elle de moi si je lui parlais ainsi ? Mais si au contraire je
le lui apporte comme un témoignage de mon grand amour pour elle, quel prix
n'attachera-t-elle pas à mon souvenir ! De même, Dieu désire que ses enfants ne
le servent pas seulement par devoir. Il n'aime pas que ce soit une chose
pénible pour nous de faire sa volonté.
Voyez les
soldats. S'ils ne se battent que parce qu'ils y sont forcés, ils ne
remporteront pas beaucoup de victoires. Si, au contraire, ils se battent par
amour pour leur pays et pour leurs chefs, rien ne pourra leur résister. Si ce
n'est pas l'amour qui vous pousse à travailler pour Christ, ne vous attendez
pas à être béni dans votre oeuvre.
Napoléon essaya
de fonder un empire par la force des armes. Alexandre le Grand, César, d'autres
conquérants encore, l'avaient essayé avant lui, mais tous, ils ont échoué.
Jésus-Christ a fondé son royaume sur l'amour, et ce royaume durera
éternellement.
Quand nous
aurons appris à aimer véritablement, tous les mobiles égoïstes et bas
disparaîtront, et notre ouvrage pourra supporter l'épreuve du feu.
Je voudrais
vous rappeler encore une chose. L'amour ne songe jamais à ce qu'il recevra en
retour de ce qu'il donne. Vous avez tous lu dans l'Evangile selon saint Mathieu
la parabole du père de famille qui avait loué des ouvriers pour travailler dans
sa vigne. Après en avoir loué plusieurs dès le matin, il en trouva d'autres Ã
différentes heures du jour, et les envoya aussi à sa vigne. Quand le soir fut
venu, ceux qui avaient travaillé depuis le matin s'attendaient à recevoir un
salaire plus élevé que les autres; aussi se mirent-ils à murmurer et à se
plaindre lorsqu'ils virent qu'ils recevaient tous la même chose. Mais quelle
fut la réponse du père de famille : « Mon ami, je ne te fais point de tort ;
n'as-tu pas accordé avec moi à un denier par jour? Prends ce qui est à toi et
t'en va. Je veux donner à ce dernier autant qu'à toi. Ne m'est-il pas permis de
faire ce que je veux de ce qui est à moi? Ton oeil est-il mauvais de ce que je
suis bon ? Ainsi les derniers seront les premiers, et les premiers seront les
derniers.»
J'ai presque
toujours vu que les chrétiens qui se demandent sans cesse quelle bénédiction le
Seigneur leur donnera en récompense de leur travail ne sont jamais contents.
L'amour vrai travaille de tout son coeur sans poser de conditions. Ne
marchandons pas avec le Seigneur, mais soyons heureux de faire tout ce qu'il
nous demande.
Je suis certain
que si nous nous mettons à l'oeuvre avec un coeur plein d'amour pour ceux que
nous désirons atteindre, nous verrons toutes les barrières s'abaisser devant
nous . L'amour fait naître l'amour, de même que la haine fait naître la haine.
L'amour est la clef du coeur humain. Quelqu'un a dit: « La lumière est faite
pour l'intelligence, et l'amour est fait pour le coeur. » Commencez par gagner
l'affection de ceux que vous cherchez à atteindre; il vous sera facile ensuite
de les amener à Christ.
Je vois des
enfants parmi ceux qui m'écoutent. Permettez-moi de leur raconter une histoire.
Il y avait une fois un petit garçon qui demeurait sur la lisière d'un bois. Un
jour, se croyant seul, il s'amusait à chanter quand il lui sembla entendre la
voix d'un autre enfant assez près de lui. - « Hé ! là -bas ! » s'écria-t-il. -
«Hé ! là -bas ! » répondit la voix. Il ne savait pas que c'était l'écho de sa
voix, et se mit à crier: « Tu es un méchant garçon ! » Naturellement, la voix
répondit: « Tu es un méchant garçon. » Après quelques autres paroles du même
genre, il rentra à la maison, et dit à sa mère qu'il y avait un vilain enfant
dans le bois. La mère, qui comprit ce dont il s'agissait, lui dit: « Oh ! non,
il n'est pas méchant. Parle-lui gentiment, et tu verras s'il ne te répond pas
de même.» Le petit garçon retourna dans le bois et cria: « Hé ! là -bas. » - «
Hé ! là -bas. » - Tu es un bon garçon. » - Inutile de dire que la voix répondit
: « Tu es un bon garçon. » - « Je t'aime bien. » Et la voix, toujours fidèle,
répondit : « Je t'aime bien. »
Je vous vois
sourire ; et pourtant cette petite histoire vous donne le mot de l'énigme.
plusieurs d'entre vous, peut-être, sont convaincus qu'ils ont des voisins fort
désagréables et qu'il est impossible d'avoir de bons rapports avec eux ; il est
bien possible que les torts soient tout autant de votre côté que du leur. Si
vous aimez ceux qui vivent près de vous, ils vous aimeront aussi. Comme je le
disais tout à l'heure : l'amour est la clef qui ouvre tous les coeurs. Il n'y a
pas au monde un seul être humain tombé si bas qu'on ne puisse l'atteindre avec
de l'amour, de la douceur et de la bonté. Il faudra peut-être des années pour
en venir à bout, mais la chose est possible. L'amour ne peut pas rester
inactif.
On a dit avec
raison : « On peut dissimuler sa fortune, enfouir ses talents ; il y a une
chose qu'on ne peut ni dissimuler ni enfouir, c'est l'amour. » Il ne se nourrit
pas de lui-même, il lui faut un aliment.
Il y a quelques
années, la fièvre jaune éclata dans l'une des villes de nos Etats du Sud. Les
décès étaient si nombreux que les autorités de la ville ordonnèrent qu'on
enterrât les morts rapidement, sans prendre le temps de faire de funérailles.
Une charrette allait de maison en maison prendre les morts et les porter au
cimetière. Une famille étrangère était venue depuis peu s'établir dans cette
ville. Le père fut bientôt atteint par l'épidémie, et mourut. Les voisins
avaient peur de la contagion, et personne n'osa aller dans la maison des
pauvres affligés. La mère ne tarda pas à être frappée à son tour. Avant de
mourir, elle appela son petit garçon et lui dit : « Je vais bientôt partir ;
mais quand je serai morte, le Seigneur Jésus viendra prendre soin de toi. »
Elle n'avait personne sur la terre à qui confier son fils. Peu de temps après,
elle mourut, en effet, et son corps fut porté au cimetière. Le petit garçon
suivit la charrette jusqu'au bord de la tombe, et vit la place où l'on déposa
le corps de sa mère, puis il retourna à la maison.
Mais il se
sentit bien seul, et quand il commença à faire nuit, il eut peur et ne voulut
plus rester dans la maison. Il alla s'asseoir sur le seuil de la porte et se
mit à pleurer. Enfin il retourna au cimetière, il se coucha sur la tombe de sa
mère et s'endormit en pleurant.
Le lendemain
matin, un monsieur qui traversait le cimetière vit l'enfant qui pleurait. « Que
fais-tu là , mon enfant? » lui dit-il. « J'attends le Seigneur Jésus. » Le
monsieur désira savoir ce que l'enfant voulait dire, et se fit raconter son
histoire. Il en fut ému, et dit au petit garçon : « Eh bien, mon enfant, c'est
moi que le Seigneur Jésus a envoyé pour prendre soin de toi. » L'enfant leva
les yeux vers lui, et répondit : «Vous avez été bien longtemps à venir.»
Qui oserait
prétendre que si nous aimions véritablement notre Maître, nous ne réussirions
pas à atteindre les masses, qui semblent maintenant hors de notre portée ? Il
n'y a pas d'ivrogne, il n'y a pas de créature coupable, il n'y a pas d'athée Ã
qui nous ne puissions faire du bien. Les athées ne peuvent pas résister à la
puissance de l'amour. C'est lui, et non le raisonnement, qui renversera
l'athéisme ainsi que tous les autres faux systèmes. C'est l'amour de Christ qui
brisera le coeur le plus endurci.
Je suis sûr
d'une chose : quand ces coeurs endurcis qui rejettent maintenant le Sauveur
seront parfaitement convaincus que notre amour pour eux est l'unique mobile de
nos efforts, leur dureté commencera à s'adoucir, leur volonté rebelle
commencera à céder. Cette clef de l'amour les ouvrira. Avec l'aide de Dieu,
nous pourrons les faire sortir des ténèbres de ce monde et les amener à la
lumière de l'Evangile.
Jésus-Christ a
donné à ses disciples un signe de ralliement. Les membres d'une même
association portent, tantôt un ruban bleu, tantôt un ruban rouge pour se
reconnaître les uns les autres; le signe que Jésus-Christ a donné à ses
disciples, c'est l'amour: «C'est à ce signe que tous connaîtront que vous êtes
mes disciples, si vous avez de l'amour les uns pour les autres. » De l'amour,
pas seulement pour les chrétiens, mais pour ceux qui sont tombés. Le bon
Samaritain eut de l'amour pour le pauvre voyageur qui était tombé entre les
mains des voleurs. Si nous savions aimer comme lui, le monde découvrirait bien
vite que nous sommes les disciples du Seigneur Jésus-Christ. Ce genre
d'argument aurait plus de puissance que tout autre pour vaincre l'incrédulité
et la révolte.
Ce que je viens
de dire me rappelle ce que j'ai vu cet hiver à Londres dans une des familles où
j'ai reçu l'hospitalité. Une des jeunes filles de cette famille sentait qu'elle
ne travaillait pas pour Christ autant qu'elle l'aurait voulu, et elle eut
l'idée de faire un groupe dans une école du Dimanche. Elle a réuni maintenant
une vingtaine de jeunes garçons de treize à seize ans, l'âge le plus difficile.
Cette jeune fille chrétienne s'est dit qu'elle commencerait par se faire aimer
de tous ces jeunes garçons afin de les amener ensuite au Sauveur. Il est
touchant de voir comme elle a su gagner leurs jeunes coeurs, et je crois
qu'elle les amènera tous à une vie pure et sainte.
Si nous sommes
prêts à travailler dans ce même esprit, nous sauverons la jeunesse de notre
pays; au lieu de remplir nos prisons et nos refuges, nos jeunes gens et nos
jeunes filles deviendront des membres utiles de l'Eglise de Dieu, et seront une
bénédiction pour la société.
Un de mes amis
en Amérique a fondé une grande école du Dimanche. Il pensait que les enfants
qui reçoivent de mauvais exemples chez eux n'ont pas d'autre chance de devenir
meilleurs que de suivre l'école du Dimanche; aussi prit-il la résolution de ne
jamais renvoyer un élève qu'à la dernière extrémité.
Parmi les
enfants qui suivaient cette école, il se trouva un jeune garçon dont personne
ne pouvait venir à bout. Tous les moniteurs à qui il était confié venaient l'un
après l'autre trouver le directeur et lui dire : « Retirez cet enfant de mon
groupe ; il fait du mal aux autres ; il dit de vilaines choses, et il détruit
tout le bien que je pourrais faire. » Enfin mon ami crut qu'il serait obligé de
prononcer publiquement l'expulsion de cet enfant insubordonné, et dans la
réunion des moniteurs, il annonça son intention. Une jeune fille qui ne l'avait
pas encore eu dans son groupe, demanda alors la permission d'en faire l'essai :
« Je ferai tout ce que je pourrai, dit-elle, pour me faire aimer de lui. » - Le
Directeur était convaincu qu'elle perdrait bientôt patience; néanmoins il mit
l'enfant dans son groupe, selon son désir. Le petit garçon ne tarda pas Ã
enfreindre les règlements, et la jeune fille fut obligée de le punir. Il en fut
tellement irrité, qu'il se mit en colère, et lui cracha au visage. Elle prit
tranquillement son mouchoir et s'essuya la figure. Après l'école, elle lui
demanda de l'accompagner jusque chez elle.
« Non,
répondit-il, je ne veux plus vous parler, et je ne reviendrai plus jamais dans
cette affreuse école. » Elle lui demanda, alors, s'il voulait bien qu'elle le
reconduisit chez lui. Il refusa encore. « Eh bien ! lui dit-elle, je suis très
fâchée que vous partiez, mais si vous voulez passer chez moi mardi matin, vous
trouverez un petit paquet à votre adresse. Je n'y serai pas moi-même, mais le
domestique vous le remettra de ma part. » L'enfant répondit grossièrement « Je
n'ai pas besoin de votre paquet : vous pouvez le garder. » Cependant la jeune
fille était convaincue qu'il viendrait le chercher.
En effet, quand
vint le mardi matin, le petit garçon était tout-à -fait remis de son accès de
colère. Il se rendit à la maison de la jeune fille, et dès qu'il eut sonné, un
domestique lui apporta le paquet. Lorsqu'il l'ouvrit, il y trouva une petite
jaquette, une cravate, et ce qui valait encore mieux, une lettre écrite par sa
monitrice. Elle lui disait dans cette lettre, combien elle avait prié pour lui,
soir et matin, depuis qu'il était dans son groupe. Maintenant qu'il allait la
quitter, elle lui demandait de se rappeler que, tant qu'elle vivrait, elle ne
cesserait pas de prier pour lui et qu'elle espérait qu'il deviendrait un homme
de bien.
Le lendemain
matin de bonne heure, le petit garçon sonnait de nouveau à la porte de la jeune
fille. On le fit entrer dans le salon, et quand sa monitrice vint le rejoindre,
elle le trouva en sanglots. Elle lui demanda avec bonté la cause de son
chagrin. « Oh ! répondit-il, je n'ai pas été heureux un seul instant depuis que
j'ai reçu votre lettre. Vous avez été si bonne pour moi, et j'ai été si
méchant. Je vous en prie, pardonnez moi. »
En finissant ce
récit, mon ami, le directeur de l'école, ajouta: « Il y a environ dix-huit
cents enfants dans l'école, et il n'y a pas de meilleur élève que ce garçon-là .
»
Pourquoi ne
suivrions-nous pas l'exemple de cette jeune fille ? Ah ! que chacun de nous se
consacre aujourd'hui, tout de nouveau, à Dieu et à son service.
Source: Extrait
du livre de Moody: "A l'oeuvre" / http://456-bible.123-bible.com
Moody D. L
Source : http://www.bible-foi.org/